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11 septembre 2025

Michel Spitz

VILLA CAVROIS / ARCHITECTE MALLET-STEVENS

Grand vaisseau moderne construit sur les hauteurs de Roubaix, la villa Cavrois présente un étonnant parement de briques jaunes et des intérieurs aussi raffinés que des décors de cinéma. Chef-d'œuvre de l'architecture du XXe siècle conçu par Robert Mallet-Stevens entre 1929 et 1932, la villa Cavrois a connu une histoire mouvementée jusqu'à sa restauration et son ouverture au public en 2015.
Son commanditaire, Paul Cavrois, un industriel du Nord bien établi, désirait faire construire une demeure assez vaste pour accueillir sa famille nombreuse ainsi que le personnel à son service. Sa rencontre avec Robert Mallet-Stevens va orienter son projet vers un objet-manifeste, un paquebot dressé sur les hauteurs de Roubaix, en un contraste saisissant avec les maisons bourgeoises et traditionnelles du voisinage. Mallet-Stevens maîtrise tous les aspects de la conception : la silhouette et la géométrie de la villa, les meubles à la fois simples et luxueux, les matériaux choisis spécifiquement pour chaque pièce - marbres et bois précieux dans les espaces de réception ou carrelages aux couleurs sobres dans les salles de bains et la cuisine, les dispositifs d'éclairage et jusqu'aux systèmes de chauffage ou de diffusion de la musique dans toute la maison.
Occupée pendant la Seconde Guerre mondiale, vendue par les héritiers au milieu des années 1980, abandonnée, vandalisée, la villa est rachetée en 2001 par l'État qui décide d'entreprendre alors sa complète restauration. La commission nationale des monuments historiques a souhaité retrouver la distribution et les volumes intérieurs d'origine, modifiés par les cloisonnements et entresolements créés à la fin des années 1940. La villa présente, par ses matériaux, son aspect, son confort intérieur et son vocabulaire décoratif, un parti pris résolument moderne. Les travaux engagés – passés depuis 2012 sous la maîtrise d'ouvrage du Centre des monuments nationaux – n'avaient d'autre objectif que de rendre à cette demeure son lustre originel. Aujourd'hui ouverte à la visite, elle est assurément l'une des plus belles réalisations de Mallet-Stevens, en même temps qu'un jalon essentiel de l'histoire de l'architecture moderne.
Je vous invite à vous référer aux excellents ouvrages de mon ami Richard Klein, études de la villa Cavrois, détaillant le contexte de la commande, l’histoire de la conception et de l’édification, l’analyse de l’édifice et de sa situation dans le contexte des années trente. Photos © Michel Spitz













4 septembre 2025

Michel Spitz
2/9/2025

Église Notre-Dame-de-Toute-Grâce du plateau d’Assy Passy - Haute-Savoie 1946

Voilà ce qu’on appelle encore aujourd’hui la leçon d’Assy. Église des malades, église de montagne dialoguant avec le ciel, Notre-Dame-de-Toute-Grâce a réconcilié l’Église institutionnelle avec l’art vivant ; elle est en cela la référence du renouveau de l’art sacré au XXe siècle. Elle entrera dans l’histoire de l’art avant même sa consécration, mais ne sera complètement protégée qu’en 2004.
L’église, destinée à la station de cure et aux sanatoriums récemment aménagés et alors seulement pourvus de chapelles ou lieux de culte distincts, a été conçue par l’architecte Maurice Novarina, retenu à l’instigation du chanoine Jean Devémy. L’exécution du gros œuvre a commencé en 1937 et s’est achevée avant la guerre. L’édifice a été terminé en 1946 et consacré en 1950. Le décor intérieur et extérieur en fait un musée d’art moderne et d’art sacré, fruit de l’amitié entre le père Couturier, avec des œuvres de Georges Rouault, Pierre Bonnard, Fernand Léger, Jean Lurçat, Germaine Richier, Jean Bazaine, Marguerite Huré, Henri Matisse, Marc Chagall, Georges Braque, Jacques Lipchitz... Le long de la route qui monte à Assy sont également présentées des sculptures de Calder, Féraud, Semser, Cardenas ou Gardy Artigas.
La commande la plus marquante est celle, passée en 1949, à Germaine Richier, du Christ installé dans le chœur en position centrale. Sans croix, d’un corps décharné marqué par le souvenir des rescapés de la Shoah comme par la lecture du serviteur souffrant (Isaïe 53), la figure s’impose par sa violence tragique à nulle autre pareille. L’expressionnisme pathétique du corps n’empêche pas que les gestes des bras immensément ouverts se montrent résolument accueillants, paternels. Et, sur le visage mutilé, déformé et déshumanisé par la souffrance, se lit dans la déchirure même des traits une grandeur, une puissance que rien ne peut désarmer. Jésus du Vendredi Saint, Jésus de la gloire dans la croix, crucifix dans lequel seule la patine dorée du bronze laisse entrevoir une promesse d’aube.
La violence de l’œuvre suscite la polémique, attisée autant par des groupuscules traditionnalistes que par une photographie en noir et blanc qui assombrit encore la figure. Et, pour étouffer le problème, la décision est prise le 1er avril 1951 par l’évêque d’Annecy, Monseigneur Cesbron, de retirer l’objet du scandale de la chapelle qui a été consacrée le 4 août 1950. Il y eut des cris, des protestations, des clameurs violentes, qui paraissent aujourd’hui plus que légitimes face à l’arbitraire d’une décision injuste, non fondée esthétiquement. Il y eut surtout ce qu’on nomma « la querelle de l’Art Sacré » entre les tenants d’une église et d’un art modernes et la position romaine, attachée à une tradition sans vie.










31 août 2025

Michel Spitz

Un symbole de réconciliation

L’église du Souvenir/Gedächtniskirche devant laquelle s’est déroulé l’horrible attentat de décembre 2016, symbolise la volonté de reconstruction des Berlinois, aujourd’hui érigée en mémorial de la guerre. À cause de sa silhouette hors du commun, elle est surnommée « Der Hohle Zahn » (la dent creuse) par les Berlinois. L'ensemble est composé non seulement de ruines de l'église détruite pendant la guerre, mais aussi d’interventions contemporaines. Elle donne à voir un contraste vivant entre architecture moderne et Histoire. Le bâtiment moderne, composée d'éléments de béton alvéolaire dans lesquels des briques de verres ont été insérées, est construit entre 1959 et 1961 d'après les plans d'Egon Eiermann.
Le monument cultive un lien avec la cathédrale de Coventry en Angleterre, détruite à la même époque par des bombardements nazis et consacrée le même jour, soit le 25 mai 1962.
À l'intérieur de la nef octogonale, les briques de verre colorées de Chartres insérés dans les cadres en béton créent une lumière bleue intense et un calme méditatif. Cette symphonie en bleu, couleur de la paix, parsemé de rouge qui symbolise la joie est une œuvre majeure du maître verrier français Gabriel Loire (1904–1996). Jacques Loire se souvient bien de ce projet gigantesque de 2.500 m² réalisé par son père, Gabriel, et mené sur plusieurs années : « C'est en regardant les vitraux de la cathédrale de Chartres qu'il a eu l'idée de faire, là-bas, un ciel étoilé. Ce bleu, tourné vers l'Allemagne de l'Est, était aussi un signe de paix. » Deux années de travail ont été nécessaires pour fabriquer ces vitraux, transportés en camion jusqu'à Berlin : « Je sais qu'il était très fier de réaliser ce travail, et c'est toujours une référence importante. »

27 août 2025

Michel Spitz
26/8/2025

"The Mystery of Banksy - A Genius Mind" : une très belle exposition à Fribourg-en-Brisgau qui retrace l'histoire du street art et de Banksy. L'artiste et ses œuvres ont rapporté des millions de dollars, faisant de lui l’un des artistes vivants les plus connus au monde. Son propos porte le plus souvent des messages puissants et provocateurs, sur des thèmes tels que la guerre – comme en Ukraine, en 2022 – le capitalisme, le contrôle social ou encore les droits de l’homme.
Célèbre dans le monde entier, il n'en reste pas moins un mystère. Banksy, artiste graffeur et peintre, né à Bristol et resté anonyme jusqu'à aujourd'hui, est connu pour avoir remis en question les limites du marché de l'art et dont les œuvres font fureur depuis des années. L'exposition à succès "The Mystery of Banksy - A Genius Mind" met en scène cette icône de l'art. Une sélection inédite de plus de 200 de ses œuvres y est présentée. Graffitis, photographies, sculptures, installations vidéo et impressions sur différents matériaux tels que la toile, le tissu, l'aluminium, le Forex et le plexiglas ont été reproduits et rassemblés spécialement pour cette exposition spéciale. "The Mystery of Banksy - A Genius Mind" offre au visiteur, un aperçu complet et un regard sur l'ensemble de l'œuvre de ce génie et artiste d'exception.









10 août 2025

Michel Spitz

Bibracte, musée et site archéologique

-9/8/2025- Le mont Beuvray est un site archéologique et naturel d’exception. C’est aussi un peu la montagne sacrée des Morvandiaux. Lieu de rassemblement et de fréquentation continue à travers le temps, le site est associé à de nombreuses légendes. Il offre à voir, lire et comprendre des paysages ruraux préservés, aux formes douces et arrondies, sans altération majeure. Le site accueille aujourd’hui un musée et un centre archéologique européen unique en France qui réunit chercheurs et étudiants pour faire progresser la recherche archéologique sur l’âge du Fer.
Le musée et le Centre archéologique européen de Bibracte ponctue le paysage du Morvan de sa sobre et élégante horizontalité. La pierre, le béton, le verre et le métal, dessinent une ligne résolument contemporaine qui s’inscrit dans la topographie tout en soulignant « l’histoire sourde du lieu ». Le musée, pour ses 30 ans, vient d’inaugurer une nouvelle extension avec l’ouverture de l’exposition « Architecture inversée ». Cette exposition retrace l’aventure architecturale qu’a représenté ce projet d’ampleur au cœur du Morvan et qui est aujourd’hui labellisé « Architecture contemporaine remarquable » par le ministère de la Culture. Son architecte, Pierre-Louis Faloci y développe de grands principes qui nouent une relation intime entre les bâtiments et le lieu : souci de l’intégration paysagère, cadrage du regard, modularité des espaces, déclinaison de motifs empruntés au site et donc, ici, à l’archéologie, comme le quadrillage, l’émergence des murs ou la stratigraphie des matériaux qui rythment les façades. Lauréat en 2018 du Grand Prix national de l’architecture, Pierre-Louis Faloci avait reçu en 1996 la prestigieuse Équerre d’argent pour la réalisation du musée de Bibracte. Photos © Michel Spitz