L’interview complète de Tristan Denéchaud donnée au Contre-Point Colmarien
Tristan Denéchaud, les Colmariens aimeraient vous connaître davantage. Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? Nous parler de votre jeunesse et de ce qui vous a conduit à la politique ?
Né il y a 37 ans dans une petite commune de Charente-Maritime, je suis fils de secrétaire et d’instituteur, issu d’une famille d’agriculteurs et d’artisans. J'ai un frère, de 14 ans mon cadet, ce qui fait que même sans avoir d'enfant pour l’instant, je sais assez bien ce que c'est que de s’en occuper.
Si j’étais un élève plutôt studieux et calme, je n’ai jamais brillé par mon côté discipliné, avec souvent un esprit critique assez développé, pour ne pas dire un peu rebelle. Ma curiosité et ma passion pour la musique, la géographie, les langues étrangères et la connaissance du monde en général (bien que n’ayant pas souvent la possibilité de voyager à l’époque) ont rapidement fait de moi un Européen dans l’âme. Attiré par les sciences humaines, mon bac économique & social en poche, je me suis dirigé vers une 1ère année de licence en histoire-géographie avant de rejoindre Sciences Po Rennes. L’occasion d’effectuer une année à l’étranger, au Canada, avant de terminer par un master en Droit des collectivités locales à Sciences Po Strasbourg, qui me prédestinait à travailler au service de la collectivité.
Justement, et l’Alsace dans tout cela ?
J’ai choisi l’Alsace il y a 16 ans pour finir mes études. Attiré par la culture très riche de la région, je me suis lancé dans l'apprentissage de l'alsacien. Mon engagement pour l’Alsace ne date pas d’hier. Contrairement à Gilbert Meyer qui a pénalisé notre belle région et Colmar plus d’une fois, je n’ai jamais retourné ma veste sur le sujet. J’ai co-fondé le collectif transpartisan Alsace Unie et suis membre du Mouvement pour l'Alsace depuis sa création.
Et Colmar ?
J’ai rapidement choisi d’habiter Colmar. J’aime Colmar. Sa taille idéale, sa situation géographique, son atmosphère. Une ville aux multiples visages, qui a un grand potentiel.
C’est pour ce potentiel que vous vous êtes immédiatement engagé ?
Oui ! J’étais attiré depuis toujours par la politique, mais au sens noble. La vie de la cité, la politique locale, concrète, celle qui permet d’améliorer la vie des gens, plutôt que le spectacle médiatique national fait de trop de postures et de polémiques stériles. Dès l’année de mon arrivée à Colmar, j’ai eu un engagement actif dans la vie municipale. C’est en novembre 2008 que je saute dans le grand bain, dans le cadre des nouvelles élections municipales colmariennes, à la suite de l’annulation de celles de mars pour irrégularités commises par Gilbert Meyer. C’est le début du collectif Bougeons les lignes, une démarche novatrice, transpartisane, un coup de jeune et de fraîcheur sur la ville. Deux ans après avoir adopté Colmar, 48 Colmariens, pour la plupart natifs de la ville, m’ont choisi pour mener la bataille. J’ai ressenti cela comme un beau geste d’adoption, qui m’a permis d’entrer au Conseil municipal de Colmar, avec un score très honorable, que même les plus fins analystes politiques de l’époque n’avaient pas anticipé.
Vous avez remis le couvert en 2014.
En effet. J’ai renouvelé cet engagement municipal en 2014 avec l’entrepreneur Bertrand Burger, dans une liste transpartisane de centre-droit, qui m’a permis de siéger aux côtés d’une certaine Brigitte Klinkert, actuelle Présidente du Conseil Départemental du Haut-Rhin. Depuis 2015, je suis par ailleurs suppléant d'Éric Straumann au Département.
Cela fait de vous une figure incontestable et incontestée de l’opposition municipale.
J’ai en tout cas toujours été dans une démarche constructive, c’est ce qui me caractérise. Au sein du Conseil municipal, je m’exprime très régulièrement. Parfois dans le sens de l’équipe majoritaire, car bien évidemment tout n’est pas mauvais. Souvent toutefois en m’opposant à ce qui est proposé, ou imposé, plutôt. Mais quand je m’oppose, c’est pour proposer des alternatives crédibles, dont certaines ont vu le jour bien des années après, comme le macaron de stationnement résident ou le réaménagement de la rue Schwendi/rue de l’Est.
Vous êtes également entré en 2015 au conseil de Colmar Agglomération.
En effet. Un mandat qui m’a permis de mieux connaître les enjeux communautaires ainsi que les communes voisines et leurs élus. Les élections municipales, en particulier dans la ville-centre, sont aussi un enjeu intercommunal souvent sous-estimé. L’économie, les transports en commun, l’environnement, le traitement des déchets, et diverses compétences essentielles sur lesquelles je suis très engagé, sont aujourd’hui du ressort de l’intercommunalité. Nous menons donc aujourd’hui une campagne aussi bien communautaire que municipale.
Vous êtes également militant, n’est-ce pas ?
Oui, notamment au sein du Mouvement démocrate, où je pense pouvoir me prévaloir de toute la confiance acquise au fil des années auprès des différents responsables et adhérents. Dès mon adhésion, j’ai été désigné comme responsable de la commission « Cadre de vie » en vue de la réflexion pour les municipales de 2008. Pour les élections de 2014, j’ai été nommé chef de file du MoDem pour Colmar, puis la fédération Alsace m’a désigné comme son vice-président. En 2015, les adhérents du territoire Colmar-Rhin-Vosges m’ont élu (puis réélu début 2019) pour les représenter. Je suis ainsi entouré depuis plusieurs années d’une petite équipe soudée et fiable, intégrée aujourd’hui dans un large collectif de coéquipiers d’autres partis ou non encartés, aux profils et aux compétences variés.
Vous avez également une activité professionnelle. Vous ne vivez donc pas de la politique ?
Certainement pas. Parmi les élus locaux, rares sont ceux aujourd’hui qui vivent de la politique. Il va sans dire que si je deviens maire je me consacrerai à 100% à mon mandat.
Pendant 12 ans, professionnellement, j’ai œuvré au quotidien pour la coopération transfrontalière, en tant que chargé de mission Coopération transfrontalière et responsable de la Mission pour la Promotion du Bilinguisme au Conseil Départemental du Haut-Rhin, puis responsable administratif de l’exposition internationale d’architecture et d’urbanisme IBA Basel 2020.
Vous ne travaillez donc pas sur Colmar ? Rassurez-nous, vous y habitez ?
Je suis effectivement Directeur général des services d’une commune située en Franche-Comté. Cela étant, j'ai été à Colmar toute la semaine pendant 12 ans et j'y suis toujours 3 à 4 jours à temps plein par semaine; c'est ma résidence principale. Tout le monde ne peut pas en dire autant. Si j'étais comme d'autres candidats, politique professionnel ou libéral, ce serait plus simple. Mais je fais partie de ces gens qui ont besoin d'un travail salarié pour vivre. Et en l'occurrence un travail qui doit être suffisamment loin de Colmar pour ne pas subir les pressions de certains.
Mais vous serez un maire à temps plein ?
Je serai un maire à temps plein, je m’y engage. Sachant que je consacre déjà plus de 40 heures par semaine à la campagne et il en va de même pour beaucoup de mes colistiers.
Que dit de vous votre entourage ?
Que ce soit au niveau professionnel ou politique, je suis reconnu comme une personne au style de management réactif, souple et participatif, tout en sachant m’opposer et trancher quand il le faut. Je pars du principe que chacune et chacun dans une équipe a des compétences, des connaissances à apporter, et que ce ne sont pas forcément ceux qui parlent le plus fort ou monopolisent la parole qui ont le plus de choses à dire. D’après mon entourage, je suis quelqu’un de « réfléchi, méthodique et constructif », « avec qui il est toujours agréable de travailler ».
Et s’il fallait vous résumer en deux mots ?
Fiable et très engagé. Ça fait 3 mots ? Alors, deux mots : rigueur et pragmatisme.
Et vos valeurs ?
Je crois au service public et à sa réelle valeur ajoutée, à la « flexisécurité » dans le monde du travail (plus de souplesse mais en protégeant mieux les salariés), au développement durable en passant notamment par l’innovation mais sans oublier la solidarité notamment envers les plus fragiles, une construction européenne plus ambitieuse, des lois justes et respectées par tous, la moralisation de la vie publique et des administrations plus simples, le soutien à tous les territoires de la République… Le tout en dépassant les clivages politiciens. Les services de proximité assurés par une commune vont au-delà de ces différences. J’ai coutume de dire qu’une ligne de bus, une piste cyclable ou une crèche n’est ni de gauche, ni de droite, ni même du centre, mais simplement au service des citoyens. Je serai au service de TOUS les citoyens.
Et s’il fallait retenir deux de vos engagements ?
Sans hésiter, je suis particulièrement engagé sur deux grands axes :
- Le développement durable et le cadre de vie : promouvoir les transports en commun et l’intermodalité (TER, mise en place d’un Bus à Haut Niveau de Service, location de vélos courte et longue durée, piétonnisation et voies vertes urbaines…), plus de verdure en ville, un habitat décent pour tous, renforcer les ponts entre les générations, améliorer le tri des déchets, … les idées ne manquent pas, et beaucoup ne sont pas forcément très coûteuses. C’est avant tout une question de volonté politique !
- La démocratie locale et l’ouverture aux autres villes et à l’international. Une équipe municipale dans laquelle chacune et chacun a son mot à dire, avec un nombre d’adjoints resserrés mais autonomes et pouvant vraiment porter la parole de la Ville, des processus de décision impliquant les citoyens, de vrais conseils et maisons de quartier (à mutualiser avec les écoles), un conseil des associations, plus de transparence et de concertation dans la mise en œuvre des projets, davantage de coopération, de bi-/ et de multilinguisme, etc. Ici encore, le pragmatisme et les solutions du terrain ont souvent toute leur place !
Vous ne souhaitez donc pas tout chambouler à Colmar ?
Nous ne voulons pas tout révolutionner mais le fonctionnement de la mairie a besoin d’être revu, modernisé, simplifié. Chacun doit pouvoir s’exprimer sans peur des représailles. Avec nous, pas d’augmentation des impôts payés par les habitants. Nous ne sommes pas contre les parkings et la possibilité de se déplacer en voiture, mais nous voulons renforcer les alternatives. Nous gérerons notre ville avec rigueur et bienveillance. Et avec humilité. Car comme le dit Jo Spiegel, les élus doivent garder en tête qu’ils ne sont « que de passage ». On ne peut pas s’améliorer quand on croit toujours être le meilleur !
Et vous pensez vraiment avoir suffisamment d’expérience pour déboulonner Gilbert Meyer ?
À Colmar, le contexte est tout de même bien particulier. Après 12 ans d’engagement local, c’est aujourd’hui ma 4ème campagne municipale et ma deuxième en tant que tête de liste. Notre ville est dépeinte comme conservatrice et vieillissante, mais ce n’est pas une fatalité. Colmar est presque aussi jeune que Mulhouse ou Strasbourg, et ne manque pas d’initiatives. Son électorat est plutôt ancré à droite, mais je n’oublie pas que les Colmariens ont eu deux maires plutôt centristes, démocrates-chrétiens. À l’image des autres Alsaciens, nos concitoyens sont en majorité des gens modérés et légitimistes, qui n’aiment ni l’inconnu ni les changements brutaux – sûrement car ils en ont trop subi par le passé. Et ils ont besoin d’être rassurés sur les compétences des candidats qui viennent défier Gilbert Meyer ; c’est tout à fait normal.
Donc on peut vous faire confiance ?
Je souhaite en tout cas mettre mon expérience au sein des collectivités territoriales et ma personnalité calme et réfléchie au service des Colmariens. Comme dit précédemment, après avoir été chef de projet dans un contexte franco-germano-suisse pendant 8 ans au Département du Haut-Rhin puis pendant près de 4 ans en Suisse, je suis actuellement directeur général des services d’une ville du Doubs. Une mission que j’ai choisie notamment pour parfaire ma connaissance de la gestion communale, et suffisamment à distance de Colmar pour être à l’abri de diverses pressions (je n’en dirai pas plus). En étant responsable de 25 agents, avec un budget de plusieurs millions d’euros, j’ai de nombreux projets à mener de front et des demandes, aussi bien de la part des habitants que des élus, à concilier dans le respect de l’intérêt général. Une fonction très exposée qui nécessite une probité et une éthique irréprochables.
C’est un changement de style en perspective ?
Disons que ce serait sacrément manquer de modestie que de dire que je maîtrise toutes les compétences pour diriger, seul, la Ville de Colmar. Cette cité, nous la gérerons ensemble, mon équipe et moi. Puisque j’ai bien évidemment tenu à m’entourer de profils différents du mien, et ainsi complémentaires – chefs d’entreprise, responsables associatifs, employés et ouvriers actifs ou retraités, étudiants, etc. Aucune exclusive ; une équipe doit être aussi représentative que possible, je n’en suis que le chef d’orchestre, et que serait-un chef d’orchestre sans ses musiciens ? Toujours est-il que 48 personnes me font confiance car elles n’ont aucun doute sur mes capacités. Et j’espère qu’une majorité d’électeurs pourra bientôt me témoigner cette même confiance.
Au fait : un (petit-)fils de paysan, manager territorial, Colmarien d’adoption devenu maire de Colmar… ça ne vous rappelle rien ?