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12 novembre 2020

Vivien Garnier

Coup de gueule !

Et voilà, on reconfine. Je m'y attendais depuis plusieurs semaines à vrai dire mais j'estimais ça pour décembre. La mort dans l'âme hier soir, j'ai écouté le Président. C'était un Président combatif, pédagogue et finalement désemparé. Un président qui en a ras-le-cul de ce virus, marre de vivre depuis un an à la tête d'un pays où chaque chose qu'il dit est contestée.
Et bien entendu, hier soir, j'ai vu sur les réseaux sociaux l'immmmeeeeennnnnnsssssseeeeee cortège de médecins formés en 5mn sur doctissimo, les spécialistes de la Covid19 qui n'ont rien à envier aux Praud Bourdin et Barbier.
Hier soir, j'ai vu sur les commentaires des premiers articles de presse consacrés au reconfinement l'exceptionnelle qualité des remarques de nos concitoyens, aussi stupides et grossiers que dénués de bon sens et finalement de solidarité.
Ces révolutionnaires de pacotille, dont certains squattent encore les ronds-points quand ils songent à quitter leur canapé, savent tout sur tout. Eux, ils auraient fait comme la Suède (et on aurait eu 400000 morts...), ou alors ils auraient généralisé la chloroquine (Raoult, notre nouveau Raël), ou alors ils contestent l'existence même du virus (un petit tour aux urgences et en réa, histoire que tu vois ce qu'est un respirateur, couché sur le ventre, le cul à l'air, pendant 6 semaines ?).
Oui, nos commerçants et artisans vont souffrir, encore. L'Etat doit annuler les charges durant cette période (pas les reporter, soyons logiques !).
Les banques doivent stopper les remboursements d'emprunts pendant cette période. La solidarité doit être appliquée partout. Et avec ce qu'elles nous prennent comme agios, elles ont certainement un bas de laine leur permettant de résister deux mois sans remboursement d'emprunts.
Mais ce matin, j'ai surtout envie de mettre une claque à chaque glandu qui ose ouvrir sa grande bouche en prétendant parler en expert.
Franchement, vous imaginez que c'est une décision facile de mettre un coup de frein à l'économie, deux mois avant Noël ? Vous imaginez certainement que Macron s'est levé un matin en disant : "tiens, si je mettais le pays dans la merde, histoire de faire chier le monde et de tenter de me suicider politiquement" ?
Le pire, ce sont certains élus de mon secteur (je tairai leur nom) qui maintenant propagent des conneries monumentales sur les réseaux, du type "le Covid c'est la dictature", "ce virus n'existe pas" ou "moi, parlementaire, j'aurais fait autrement"... Bravo...
La période est difficile. Personnellement, j'en ai par-dessus la tête du virus et de l'ambiance qui va avec. J'ai envie de bouger, embrasser les gens, serrer les mains, respirer sans avoir de buée sur mes lunettes. J'ai envie de voir des sourires, des rires. J'ai envie de vivre tout simplement.
Mais mon envie de vivre se heurte à ma crainte d'être à mon tour contaminé.
Mon envie de vivre se heurte à la peur de me retrouver à mon tour fiévreux, sans goût ni odorat.
Mon envie de vivre se heurte à la peur de me retrouver dans une chambre d'hôpital, tout seul, le cul à l'air, un tube dans la gorge.
Mon envie de vivre, c'est pouvoir chaque soir me coucher au côté de mon épouse, dans ce rituel immuable où l'on se prend dans les bras. Et ma crainte, c'est justement de m’endormir seul, plusieurs semaines.
Alors les contestataires, ceux qui critiquent tout sans le moindre bon sens, les "y'a qu'à - faut qu'on", les ramollis du bulbe qui se sentent supérieurs à la moyenne parce qu'ils n'ont pour seule ouverture sur le monde que leur fenêtre, leur smartphone et la télé, allez dehors, manifestez, contestez. Mais ne venez pas ensuite vous plaindre si vous êtes malades.
Oui, il y a un problème avec les hôpitaux. Ce n'est pas (que) la faute à Macron.
Le premier responsable, c'est la Cour des Comptes, qui depuis 25 ans nous dit que les hôpitaux coûtent chers. Et que les différents gouvernements (droite, gauche, etc) dans un souci d'économie de bout de chandelle, ont écouté.
Les deuxièmes responsables, ce sont les ARS. On ne peut pas être comptable dans le domaine de la santé.
Le troisième coupable, c'est le Français lui-même, qui depuis l’apparition des réseaux sociaux et de BFM (2005-2008), se croit expert en tout, sait tout, voit tout. Et finalement, à force de dire des conneries en les prétendant vérités absolues, a plongé depuis 15 ans notre pays dans une dépression chronique. Ce même Français qui juge bon de ne pas respecter les règles sanitaires au nom d'une liberté qu'il manipule à sa sauce selon les besoins.
Les quatrièmes coupables, justement, ce sont les médias. Je ne parle pas de la presse locale ni des informations en général mais des trois ou quatre principales chaînes d'info télévisées (parce que, hein !, le Français de base ne lit pas les journaux nationaux, soyons lucides deux minutes). À force de soliloquer des heures durant avec des experts en tout (des mecs capables de parler d'économie, de santé, d'agriculture, de bagnoles, de la fabrication du Morbier et de la composition des copeaux d'une armoire Ikéa), ils ont créé le vide dans les cerveaux des gens. Et comme la nature a horreur du vide, ce vide a été comblé par la bêtise et l'absence totale de jugeote.
Bref, aujourd'hui, j'ai mal à ma France. Vivement la sortie de crise. Vivement la reprise.
Mes pensées vont pour mes amis personnels médicaux, commerçants, artisans et agriculteurs. Ce sont peut-être les seuls sur qui on pourra compter les prochaines semaines.